Une brève histoire de mon épuisement démocratique

L’œil un peu torve, j’ai regardé jusqu’à pas très tard la « soirée électorale » du dimanche 24 avril 2022. Pas tout à fait remis de mon extraordinaire sens civique le mercredi précédent et le « débat » entre les deux intempérants suivi jusqu’au quasiment bout. La société du spectacle en a fait les finalistes d’une « partie » entre deux écrans de pub. Nous y sommes. Ce dimanche soir, cette pensée : Mais ils n’arrêteront donc jamais, me disais-je, moitié exsangue, moitié hagard, alors que les motos filaient le train à des voitures dans Paris et que la scénographie limite indécente d’un homme et d’une femme main dans la main entourés d’enfants se dirigeait vers l’hexagone installé devant la tour Eiffel ? Juste avant, les déchus refusaient de sortir du « JE » et annonçaient que c’était parti pour le troisième tour. A peine étions-nous dans le final du second. L’image qui apparaît à 20 h tout ça. A peine j’ai eu le temps de me remettre de mes deux dernières enveloppes bleues dans l’urne glissées. A peine j’ai eu le temps de seulement commencer à m’apercevoir comme cette campagne ultra-courte, cette séquence comme on dit de nos jours, a été fort beaucoup très trop longue. Telle une irruption incongrue du franco-français dans les décombres ukrainiens ou maliens. Laquelle Ukraine nous avait saisie, bien malgré elle sous l’œil mêlé de Moscou et du cyclone, alors que juste et si peu nous étions en train de nous remettre à redécouvrir des visages humains quand nous sortions dans la rue, après cette autre séquence, sanitaire celle-là (et qui s’apprête apparemment à revenir), et avec, confinements, masques, vaccins, et tout le toutim.
Invisibles sacrifiés, sur le devant de la scène soudain braqués par les projecteurs, mais vite, hein, on va pas s’éterniser non plus, augmentations de salaires ici, promesses d’investissements là.
On a si peu parlé des familles endeuillées. Des anciens partis avant d’avoir tout dit. Des jeunes comprimés par les dernières innovations pédagogiques. Pressurisés à passer en même temps des diplômes et à remplir des formulaires pour leur « avenir ».
Je me disais, « ils » sont dingues, « ils » jouent avec le feu. Alors que ça implose dans les foyers. Que ceux qui ont pas les mots sortent les poings, les flingues, se jettent sous des trains. Faut dire que de l’autre côté de l’Atlantique, twitter et sa mèche blonde allumaient d’autres feux mondiaux, aussi rapidement que chaque matin je me rendais à mon boulot. Tout de suite la suite, encore. Ce quinquennat de Macron 1er, a été épuisant en fait. Malotru.
Je n’oublie pas, en effet, qu’avant cela, déjà pour des histoires de carburant, d’énergie, des femmes et des hommes ont colère exprimé, se retrouvant sur des ronds-points, symboles circulaires du dernier lieu où l’on se parle. Parfaits bouc-émissaires déjà. On en parle encore. Nous sommes en 2018. On a gagné juste avant la Coupe du Monde de foot mais 20 ans après on ne s’est pas attardés. Il était déjà loin, le temps des nuits debout en 2016, éphémère mouvement intello commencé sous l’avant Macron, alors ministre de l’économie. En pleine « loi travail »…
Il m’a échappé comme tout cela narre seulement la suite de ce qui a précédé.
Ces divisions sans fin d’une société morcelée n’en finissant plus de se chercher des convergences et de les voir se diluer aussi sûrement que s’abaisse une matraque, que passe « quand même » une loi, qu’un renoncement en appelle un autre lequel en chasse un précédent.
Eh oui, déjà le tout de suite la suite, qui n’en finit plus de nous saper le quotidien.
Car à mesure qu’on sort d’un truc en mode post-trauma (Les tueries de Toulouse c’est 2012, Charlie-Hebdo et le Bataclan 2015, Nice 2016), hop, on enchaîne, on enchaîne. Et ça oui, c’est sûr, on enchaîne.
Le Quinquennat de Hollande comme celui de Macron a claqué avant même d’avoir commencé. Itou pour leurs prédécesseurs, en fait. Mitterrand a eu 1983, Chirac la cohabitation, Sarko la crise financière. Tabassés dans un coin du ring.
D’ailleurs, durant toutes ces années, on m’a parlé de sécurité, de travail, de pouvoir d’achat, de dette publique, précisément parce que pas, ou plus, ou moins. Et en même temps, comme dit l’autre, « baisses d’impôts » (mais augmentation de la TVA), « service public » démantelé, mais main sur le coeur, notre cher (trop cher ? si cher ?) modèle Français…
Mon épuisement démocratique, c’est cette sensation de pyromanes du futur : justice, éducation, hôpital, université, grand âge. Cette démocratie « à la française », putain putain, elle nous épuise. Car si le SIDA c’est 1981, le choc pétrolier c’est 1973, « L’effondrement du bloc de l’Est » c’est dans les années 1990, la « construction européenne (de 6 à 15 puis à 26) aussi. L’avénement d’internet également. Les attentats à New-York c’est 2001. Chirac et la maison qui brûle en 2002. Le référendum européen en 2005. Putain Putain. Arno, le chanteur Belge, est mort samedi 3 avril et le chante dès 1997. Vous me direz Dutronc et l’opportuniste c’est 1966.
Ici et ainsi narrée, mon anonyme histoire démocratique ressemble à une vaste partie de ball-trap à mesure que les cons-descendants (parfois dans l’arène) parlent à leurs con-patriotes, leurs con-citoyens, au sortir de leurs cons-ciliabules. Pendant que dans mon con-fort je con-tinue à con-templer et à tant bien que mal con-battre.
Con-seil : s’extirper de la torvitude, quelques instants, quelques instants seulement. Qu’on puisse, enfin si vous le permettez, déjeuner en paix. Puisque ça continue. Et qu’il faudra que ça cesse, quand même. Ambiance sonore

Le vote de l’ours blanc

A quelques encablures maintenant d’une échéance qui ne changera pas grand choses à nos existences, malheureusement, il y a quelque chose de malaisant dans une une campagne épuisée pendant qu’une vraie guerre qui ne dit rien de bon a éclaté près de chez nous, faisant oublier les autres guerres qui ne cessent de se tenir ailleurs, et faisant passer celle menée contre un virus comme une arnaque verbale.
Nos grands dossiers ressemblent soudain plus encore à des petits problèmes pour peu qu’on fasse la liste de ces dossiers traités par-dessus la jambe et qui disent une société française des malaises et des oublis.
Pas une strate de la population n’est épargnée.
Les enfants, les lycéens, les étudiants, les jeunes adultes, les midlle of life, les quinquas, les seniors.
Les « issues et issus » de minorités, les moins riches que d’autres, les abandonnés.
Côté pro, pas mieux : les sans-emplois, les avec, les boites qui trouvent pas de salariés, les métiers de l’aide qui sont au plus mal, les cadres qui pètent des câbles.
Et le caillou bleu, qui est comme nous finalement : puisque ça se réchauffe, d’abord, ça se refroidit. On sait qui sera le plus fort à la fin.

Il fait très froid dans notre démocratie qui en est de moins en moins une à mesure que comme partout, l’impérialisme des hommes force les frontières fragiles des pays qui, ne l’oublions pas, pour certains, ont été tracés à la craie.
A quelques encablures donc d’une élection présidentielle qui cache juste l’élection suivante laquelle donnera à un gouvernement les moyens de mettre ses idées si tenté est que ce soient des idées, je veux juste lancer une alerte.
Ne votez pas pour ces candidats qui prônent le repli sur soi. Ni pour ceux qui annoncent des baisses d’impôts. Ni pour ceux qui parlent économies.

Ils sont des escrocs. Ils sont des fossoyeurs.
Le repli sur soi est un déni de réalité.
Les baisses d’impôts l’assurance d’une cassure plus grande encore de ce qui est de la responsabilité de l’état français : l’éducation, le soin, la justice.
Les économies sont un mot indécent quand sans aller très loin, on regarde qui paie le quoi qu’il en coûte et qui s’est enrichi.

Depuis que je suis en âge de voter, je me suis toujours efforcé de « voter pour ». Je ne vais pas me dérober cette fois encore même si force est de constater que plus ça va et moins je suis dans les bons camps. Il m’est arrivé d’être majoritaire, mais c’était y’a longtemps. Je suis de plus en plus minoritaire, quand on ne me dit pas que je suis nul.  Blanc est pourtant une belle couleur. Un beau projet.

Je pensais ne pas aller voter cette fois. Je pense toujours que je ne devrais pas voter tellement on se fiche de nous et de nos tronches. Je vais pourtant aller voter. Parce qu’au détour d’une baguenaude sur le net, fort à propos, une internaute que les femmes s’étaient battues pour obtenir le droit de vote, et parce que au-delà du féminisme, tout simplement, l’Humain s’est toujours battu pour obtenir des conquêtes sociales dont même les plus virulents profitent sans vergogne, la mémoire bien courte.

Cette élection ne changera pas la face du monde. Cela fait belle lurette que petit pays qui joue au grand ne pèse pas bien lourd. Mais par politesse, à l’histoire, à maintenant, à demain, voter prend un sens qui ne relève plus du « devoir civique » mais bien du droit. Nous avons des droits. Et mon petit doigt me dit qu’il va falloir batailler pour que un à un, ils ne fondent pas comme une banquise aux abois.

Au moment de voter, ou pas, pensez à l’ours blanc qui dérive affamé sur un morceau de glace. Il a faim. Il est seul. Il est dangereux. Il est en survie.     

Grise est la zone

J’ai une expression qui a débarqué dans ma grammaire et y a pris pleinement sa place, comme d’autres mots ont fleuri notre langage depuis deux ans maintenant. Nous maîtrisons désormais parfaitement les notions de distances sanitaires, de masques, de gestes barrières. Notamment. Voilà autant de mots du quotidien qui décrivent en creux fort bien ce que nous vivons concrètement : un recul sans précédent à l’ère moderne des relations humaines. Ce qu’à gauche on appelle en langue de coton le vivre ensemble. Ce qu’à droite on ne nomme pas. Ce que dans les extrêmes on attise. La nation, en effet, nous demande (ce n’est pas une question bien sûr) de tuer le lien social et les relations humaines. Officiellement pour notre bien évidemment.
Le résultat sec est celui-ci : belle lurette que nous ne faisons plus ni peuple ni société et encore moins monde ; mais bulles étanches les unes des autres, chromosomes dépossédés ou dépourvus de pensées communes et de sens du bien commun. Intérêt général ? Euh ? Hein ?
Personnellement, je ne m’y fais pas. Je fais avec, c’est tout. Je respecte les règles pour pas laisser trop de plumes dans l’atmosphère, sans me prendre pour ce que je ne suis pas. Sans penser une seule seconde, par exemple, que je sais ce que tous les mots médicaux qui bassinent nos tempes veulent dire au juste.
Ce sont des langues étrangères que nous apprenons à baragouiner mais dans lesquelles personnellement je ne m’implique pas.
Cette expression, c’est « zone grise ».
Sais-tu qu’en réalité, c’est en permanence dans ces zones étranges que toi, moi, nous, vous évoluons ? Des zones où tout converge et d’où rien ne sort. Non que les informations et / ou les solutions n’existent pas : il y en a tellement qu’elles finissent par s’annuler les unes avec les autres, se contredisent, se choquent. On y perd notre latin. On y gagne en impuissance.
J’ai sous le coude deux magnifiques zones grises.
La première, c’est l’aberrante situation que fait vivre notre « belle, grande et douce » France à des jeunes venus d’autres pays. Certains arrivent mineurs. Puis prennent de l’âge. Et ce qui était possible et officiel pour elles et eux, vivre en France, survivre plutôt, ne l’est soudainement plus parce qu’ils sont plus de 18 ans et un jour. Alors ils poursuivent, mais dans l’illégalité. Les cons voient qu’ils poursuivent. Les humains que cette illégalité n’a aucun sens soudain. Mais on est dans une zone grise, du Kafka plein pot : faut des papiers, mais je te les donne pas. J’ai besoin que tu aies des papiers pour me prouver que je peux te les donner. En attendant tu es interdit de séjour. Mais on te renvoie pas chez toi.
La seconde, c’est l’incroyable situation suivante : une personne, âgée, disparaît. Il faut attendre. Qu’elle réapparaisse, ou que l’on retrouve son corps. Elle occupait un appartement en location, percevait une retraite, payait des abonnements pour l’eau, l’électricité, la téléphonie, internet. La personne est absente mais on ne peut rien faire puisqu’il faut attendre. 10 ans maximum. Théoriquement, tout peut donc rouler pendant dix ans. La machine fonctionne tranquillement : recettes perçues, dépenses engagées. C’est stupide. Mais il faut attendre. Le déluge ? Qu’un jour, des remboursements soient demandés ? Bienvenue en zone grise !
Alors quoi ?
Restent des combats du quotidien, la solitude de l’enquêteur anonyme, qui plonge dans les informations et le réel comme il peut, cherche des chemins, récolte des tunnels, convaincu que des solutions existent, mais que les problèmes demeurent. Point commun de ces deux zones grises : les parapluies que chacun dresse dans son coin comme des herses à la sensibilité humaine douteuse. Les excuses bidons que les uns et les autres trouvent pour que le ballon aille dans la parcelle du voisin. Et, de l’autre côté, les colères et les incompréhensions qui jonchent des journées devenues à certains moments étranges, à d’autres complètement surnaturels. Car rapidement, on se retrouve plutôt en mode robot à parler avec des robots de barrages en barrages alors que ce sont des situations humaines dont on parle, que notre société a transformé en situations terriblement humaines.
L’insoutenable légèreté de l’être, écrivait l’autre.
Ce qui donne, dans notre monde déconnecté et hyper connecté, terrestre et extraterrestre ceci : L’insoutenable lourdeur à être ou à n’être plus.
Zones grises. Pas grisantes du tout.
Zones grises. Dans lesquelles tout le monde patauge.
Pendant que dans leurs cuisines, des femmes et des hommes pleurent des larmes sèches. Des larmes grises.

Ambiance sonore

Un tableau de rien du tout, vraiment ?

En Lorraine, les guerres et leur souvenir ne sont jamais bien loin. C’est ainsi. Elles rôdent ou se rappellent, lorsque des cérémonies par dizaines se tiennent autour des trois conflits qui ont frappé la région entre 1870 et 1945. On appelle un peu trop cela le devoir de mémoire. Je préfère le droit de ne pas oublier…
Des traces, il en reste : dans les sols, les villages, les forêts. Dans les âmes. Même si cela évidemment s’émousse, avec le fil du temps. Parfois, il arrive lors d’une de ces rencontres que quelque chose « de plus » se produise. Une émotion. Une incarnation. Des regards et des poignées de mains pour dire une fraternité durable.

J’ai eu la chance, un samedi après-midi de presque novembre 2021, de me retrouver dans l’un de ces moments qui semblent surgir de nulle part puis posent sur vous une patte de velours.
A la base, la « simple » remise d’un tableau d’un universitaire allemand aujourd’hui âgé de 75 ans à village Lorrain den 104 habitants dont la géographie l’a fait se retrouver il y a 150 ans sur la ligne de front.
Dans les faits, une magnifique humanité qui se dévoile de manière pudique.
C’est bien que quelques jeunes aient été là : cela fait sens de se demander aussi comment, dans 150 ans, nos successeurs évoqueront nos années 2021.

L’universitaire a retrouvé ce tableau par hasard ; c’est une reproduction sans grande valeur mercantile d’une peinture portant comme titre le simple nom du village : Bréménil. A l’invitation du maire, l’universitaire a parcouru les 800 kilomètres séparant Dresde où il habite de la cité martyre située en lisière des Vosges.
Le tableau représente une vue de Bréménil détruit. Il a été peint par un soldat allemand. Heinrich Modge. Puis il a été tiré en de nombreux exemplaires pour trouver place dans de nombreuses maisons en Allemagne. Bréménil était ainsi devenu, sans le savoir, de l’autre côté de la frontière, l’image choc des combats de 1870. Voire le nom de cette guerre.

Ingo Kolboom, universitaire émérite, n’a pas caché son émotion au moment de dévoiler le tableau. Nous non plus.
En Français dans le texte, il a expliqué son travail de recherche autour de ce modeste tableau, et sa joie d’être au coeur de ce village dont il n’a longtemps connu que le nom. Un mot, juste un mot. Puis des images en couleur, des femmes et des hommes aujourd’hui, réunis en fin d’après-midi. Une fraternité affinée par les mots de l’historien :  » Qu’est-ce que les propriétaires d’alors sentaient en le regardant ? Fierté héroïque ? Pitié ? Ou simplement une sensation floue dans la tradition des paysages de ruines romantiques de la peinture du 19ème siècle ? Qui sait ? Comme d’autres reproductions et souvenirs de guerre, ces objets ont fini par disparaître peu à peu. Ce tableau que nous voyons a survécu au grand nettoyage du 20ème siècle. il est devenu un lieu de mémoire particulier et c’est cela sa valeur !« .

« Ce don, explique-t-il aussi, est un hommage à la communauté de Bréménil et un rappel, de la folie que nos peuples se sont infligés et ont infligé à eux-mêmes. Nous sommes réunis aujourd’hui pour commémorer un lieu de mémoire franco-allemand dont le contexte porte un message de longue durée, que le Maréchal Lyautey avait mis dans sa formule : cette guerre, c’est la plus monumentale ânerie que le monde n’ait jamais faite« .
Bréménil s’est trouvé un ami.

Lettre ouverte à la Gauche

Chère gauche.
Je t’écris parce que ton silence sur le fond m’assourdit et parce que tes gesticulations sur la forme disent tout de ta candeur dans cet océan où les requins ont réussi, après avoir tout bouffé, à se partager les restes sans sourciller. Sans que tu bouges. C’est dire. L’homme la femme d’état pense et agit pour les générations futures. Qu’est ce tu fous ?
Chère gauche. Je suis un citoyen de 54 balais bientôt et j’ai toujours connu « la crise » comme vous dites, vous les filmés et les interviewés qui vous revendiquez de moi lorsque vous parlez, vous qui, la main sur le coeur, prônez des valeurs qu’ensuite vous mettez pas trop tout à fait en place. Comme une religion dont réciteriez les vers moulus jusqu’à la lie.
Je suis un citoyen de gauche, et longtemps, j’ai pensé que ça ne voulait plus rien dire, gauche et droite ; je me comprenais mal : c’est juste que c’est devenu bonnet blanc et bonnet noir, et vice-versa, et c’est dommage, mais vous êtes abreuvés aux mêmes écoles.
Pourtant, que si, ça veut dire quelque chose la gauche et la droite c’est pas pareil !
Je traduis pour ma part les choses ainsi sans aucune objectivité : à gauche, le collectif, le faire société ensemble, l’humain. A droite l’individu, la thune pour pas crever dans la misère, le tant pis pour les autres.

Alors chère gauche, fonce bordel : tu ne peux plus rester ainsi les pieds englués dans un passé encore plus vieux que celui qui continue de rythmer ton pas et tes pensées même si les jeunes poussent. Tes logiciels. Tu en es encore aux jours heureux. Sérieux ? A l’époque, oui, bien sûr. Mais maintenant ? Que l’on s’appuie sur ce socle, oui, évidemment. Mais c’est pas une statue, non plus. La vie, c’est le mouvement, toujours. Bouge, la gauche, bouge !
Note, chère gauche, qu’il y a bien sûr les gauches comme il y a les droites : dans toutes les familles, il y a plusieurs chapelles. C’est très bien. On connaît et la chanson, et la fin : il n’y aura qu’une seule bannière, qu’un seul porte drapeau. Et au final de la finale, un seul élu. Cesse donc s’il te plaît de te faire croire que tu es appelée. Que nous t’appelons. Nous n’avons plus de voix… Car ça fait longtemps, trop longtemps pour ce qui me concerne, que je ne t’appelle plus vraiment, faute d’avoir vu ce que j’attendais. Je m’en suis pris, des droites et des gauches.
Le plus important c’est que nous sommes pas KO.

Chère gauche, mon sentiment en ce dimanche, c’est une question : quand vas-tu arrêter de manger des bisounours ? Que te faut-il sous le nez pour que tu voies enfin la « France » telle qu’elle est et surtout telle qu’elle est devenue, et donc, telle qu’elle n’est plus ?
Chère gauche, tu es largement tombée dans le panneau et ce qui m’interpelle, c’est que tu continues d’y foncer tête basse. On dirait que depuis 2002, oui, 2002, vingt ans déjà, tu t’es arrêtée de vivre. Nous non. Tu en chies. On en chie. Mais la différence, c’est que nous sommes des millions. Pas toi. Et je me fais porte plume, pour l’occasion : moi, ça va encore. Je vis bien. Mais quand je mets en mode collectif ce « je », je vis nettement moins bien. Et je me demande ce que tu fais, au juste ?
Si je pioche juste dans « l’actualité » de ces derniers jours, je vois quoi : le climat, oui. Les maisons passoires. Les matières premières qui augmentent. Donc qui paie ? Nous autres. Qui est actionnaire ? L’état. Qui fixe les prix ? L’état.
je vois aussi qu’un « vieux » sur quatre est en situation de « mort sociale ». Putain, ça fait mal quand même ! J’ai lu quelque part qu’il fallait autour de 10 milliards par an dans les années à venir pour que notre société « liberté, égalité, fraternité » (hum) soit à la hauteur de « l’enjeu » à relever : celui du vieillissement de la population. Lui-même fruit du « progrès » puisque, et c’est sans doute tant mieux, quoique, on meurt de plus en plus tard. L’état annonce quoi ? Quelques centaines de millions d’euros « d’aides » pour 2021 et fera pareil sous réserve de promesses électorales en 2022. Et là encore, je ne t’entends pas (assez) la gauche, ou peu, ou mal.

Mais il te faut quoi, la gauche ?
D’ici quelques années, un français sur trois aura plus de 65 ans.
D’ici quelques années, un français sur six vivra dans des conditions indignes.
D’ici quelques années, la planète aura continué à se dégrader.
En ce moment, on passe un temps fou à faire mine de « découvrir » plein d’oubliés, ceux qui ont « tenu la maison France » au plus fort de la crise et que de nouveau, au mieux, on relègue, au pire, on méprise à nouveau. Pauvre ne rime pas avec appauvri et riche avec impunité.
Car à peine j’ose ici esquisser tout ce que la crise sanitaire a révélé en terme de détresses à venir, de misère « morale ». La droite dit : on va vous augmenter. Et ça rime avec ta gueule.
Plus que jamais, « on » est un con.
C’est pas lui qui paie.
Pire : on prépare une sacrée ardoise à nos enfants et à nos petits-enfants.
Et toi, la gauche, qu’est-ce que tu dis ? Qu’est-ce que tu comptes faire ? Pourquoi tu t’emmerdes à aller « débattre » avec une création du médiaticus circus ? Pourquoi tu dis aux profs, je double votre salaire ? Mais c’est quoi ces conneries ? Tu voudrais pas sortir un peu de ces postures, assumer une bonne fois pour toute de sortir de ce « logiciel » imposé par la droite depuis tant d’années, imposé par le fric, montrer que tu as grandi, que tu n’es plus en mode « je vais prouver qu’on peut gérer même si on est de gauche » ? Rappeler que ce que l’on donne aujourd’hui et demain aux anciens, aux relégués du système, aux burnoutés du service public, c’est pas des aides, bordel, ni des subventions.
Ce ne sont pas des coûts, ni des coups. Ce ne sont pas que des dépenses. C’est juste que ça, le privé, ben il y va pas. Alors on se retourne vers le « service public ». Qui a bon dos. Qui a le dos large.

Mais regarde, la gauche, regarde : pas loin de 20 millions de français vivent mal. Vivent plus. Survivent. Tu crois pas qu’il y a largement de quoi faire pour un vrai projet de société ? Un truc qui fait envie ? Un truc qui serait résilient et pas résigné ? Tu crois pas que ça vaut « le coût » d’inverser deux ou trois trucs qui ont largement fait la preuve de leur dangerosité humaine et écologique ? Que ça vaut le coup d’investir dans la relation, le digne, le sensible et ainsi oser arpenter des chemins entrevus mais jamais parcourus, jamais balisés ?
Il est temps la gauche de faire socle et soc, de labouter la terre de la « sécurité humaine », ici en France, là-bas ailleurs dans le monde.
Bien sûr que ça aura « un coût ». Et alors ? Mieux que d’enrichir les enrichis, mieux que d’appauvrir les appauvris ? Je ne suis pas certain.
Alors fonce la gauche, parce que je pense que 2022, c’est cramé. Fonce parce que depuis 2002, tu as perdu du temps. Fonce parce les banquiers et les avocats ont tout siphonné, laissant place nette aux collectecteurs de data et aux rois de la pub, celle qui créé le besoin, la mode, la possessivité.
Tu t’es laissée siphonnée, la gauche, et tu es d’ailleurs dans le viseur aussi, la droite, le centre, les extrêmes.
J’aurais le coeur à rire, je dirais que c’est un joyeuè bordel. Mais l’est pas joyeux ce bordel. Et je n’ai pas le coeur à sourire, parce que je (res)sens les tensions qui couvent non pas dans « la » société mais dans les crânes de millions de gens, derrières les fragiles murs de briques de leurs habitations, leurs rides, leur façade pendant que certains se tirent de ce monde, s’en isolent, le fuient comme la peste.
Sauve qui pleut.

Alors fonce la gauche, et ne dis pas forcément ce que nous voulons entendre. Fait ce que nous devons. Reprenons l’état d’esprit des planteurs d’arbres et des bâtisseurs de cathédrale. Ce projet là m’ira toujours mieux que ceux du après moi le déluge, courage fuyons et la terre brûlée.
Fonce la gauche car à un moment donné, comme dit un joueur de foot avec l’élégance des mots du foot : faut se sortir les doigts du cul. Il est temps, plus que temps, de se dire que 1945 ça eût réparé la France mais que ce n’est plus possible de s’en contenter. Que 1789, ça fait date. Que Jésus n’est pas revenu.
Chère gauche, essaie d’être et non pas d’avoir, et sois ce que plus personne n’est dans ce politico circus : responsable.
Je n’ai pas écrit coupable, j’ai écrit responsable.
Et toi qui me lit, ami internaute ou pas, tu peux me dire que je pourrais tout aussi bien écrire chère droite que ça changerait rien, je me permets de te dire que ça changerait tout.
Déjà parce que je ne lui parle pas, à la droite.
Ensuite parce que je ne confonds jamais l’humain avec le billet de banque. Jamais.
Enfin parce que là, si tu n’as pas compris que tellement de choses nous dépassent qu’à tout le moins, on peut au moins sortir de l’arrogance, se savoir petit caillou du grand caillou, petit pays de la planète, petite planète dans l’univers, c’est bien dommage. Pour toi. Pour moi. Pour nous.
Bises du coude, ça m’a fait du bien de te dire tout cela !

On est toujours le migrant de quelqu’un

Un regard. Guinée Conakry. Un regard. Quatre yeux. Cameroun. Un regard. Sourire. Bonjour. Bienvenue. Côte d’Ivoire.
Ce matin. En Lorraine. Pendant que les fachos s’emparent des vertiges et jouent avec. Pendant que beaucoup invectivent. 46 migrants. Jeunes.P d’angelisme. Ni chez eux. Ni chez moi.

47 regards 94 yeux. Les leurs. Les miens. Derrière leurs costards ou leurs survêtement les yeux fermés, dans leurs postures de ruminants, ils sont nombreux a esquinter le verbe, insultants, chercheurs de poux frileux qui jouent aux caïds dans la ouate installée de leur confort en quête de quoi on se demande. Ils clament. Par voix de presse. Sur les réseaux. A me faire honte.

Ces jeunes sont là. Ils sont arrivés ici. Jusqu’ici. Et ils y ont été accueillis. I

dorment mal ou peu mais pas dans le froid de l’hiver la nuit pas dehors pas nulle part. 46 jeunes avant tout. 46 destins déjà bien saccagés. Quelques uns disent d’ailleurs leur désespérance pour souligner sans doute comme ils esperaient.
Ce matin en Lorraine. Je suis au milieu d’eux. Nous parlons. De foot, aussi. Je suis un peu moins honteux de ma France. Il y a encore des lieux où l’on ne laisse pas tomber le déluge après soi. Des lieux où des professionnels font le mieux possible leur job et il se trouve, on l’oublie tellement, on le valorise si peu tant on met de l’énergie a virer ces mains qui cherchent les poux, la même énergie qu’on mettrait a chasser les cafards, il se trouve que ce job c’est tendre la main tendre les yeux accueillir réchauffer soigner.
Ce matin. Je suis dans un foyer qui accueille des jeunes migrants. Je ne sais pas comment ils sont arrivés là. Cela ils le taisent, la plupart pour de bonnes raisons, quelques-uns pour des mauvaises. Je m’en fiche. 46 regards. 46 paires d’yeux. Comme moi. Nés quelque part.
Juste l’envie de dire bienvenue. Bienvenue ici. Bienvenue chez vous. En attendant mieux. En craignant pire. Dehors les attendent celles et ceux bavent des lèvres. L’oreille sourde. Le regard vitreux. Double vitrage. Triple même.
J’ai souvent mal à ma France pays des droits de l’homme mon cul.
Mais ce matin je me sentais bien
Mieux. Éphémère sensation. Mais c’est toujours ça de pris.
J’ai vu des jeunes.
Et c’est tout.
Fuck les haineux.
Il y a des solutions qui se trouvent. Mieux que des poux qui se cherchent dans la tronche du voisin. De l’autre. Cet autre qui fait si peur alors que quelques secondes suffisent. Un regard un bonjour un sourire.
Merci les gars.
La dignité n’est vraiment pas la où on nous la montre. Où on nous dit qu’elle est.

Révélateurs #2019

Si le Bleu est en général ma couleur, et le demeure contre vents et marées, il s’est subrepticement teinté de jaune en pleine grisaille hivernale que quelques matins blancs n’ont pas déroutés plus que cela. Et l’on sait que Bleu + jaune = vert, ce qui me va bien, en ce moment si particulier où une année vient claquer au bord des rochers pendant qu’une autre se prépare en coulisses pour entrer en scène. Exit 2018, donc. Et bienvenue 2019.

L’air de rien, ce n’est pas tous les ans que l’on souhaite la bienvenue à l’année qui vient. Même si on le fait de manière rituelle sous forme parfois de rictus, jetant des cactus sous les pieds palmés de celles et ceux à qui au fond on ne souhaite rien mais que les convenances ont placés sous nos semelles.

Le jaune de 2018, donc, a pris la forme d’un gilet, de milliers de gilets, et si les effaceurs lacrymogènes s’essaient en faire disparaître les traces, forcés de l’ordre qu’ils sont, aussi, dans les esprits, la marque a pris aussi vite qu’une mayonnaise qui n’attendait probablement qu’à être tournée les ingrédients étant prêts.

Le vert, alors, qui sera celui de 2019 j’en fais le vœu. Celui de la transition écologique que je continue pour ma part à considérer comme un levier et une opportunité, non comme un fardeau. La transition, voilà un mot qui cause dans le Landerneau puisque si l’on desserre les pinces des étaux entres les extrêmes, il reste de l’espace pour franchir quelques paliers. Grandir un peu, si je puis dire. En humanité et en pragmatisme, ce que même les féroces utopistes comme moi savent manier sous leurs dehors idéalistes. Ils ont pris de la bouteille, les utopistes de mon crû. Ils raisonnent en générations. Ils savent que le chemin vaut bien mieux que l’arrivée à bon port. Mieux : ils savent qu’ils ne verront pas le port, eux, mais que ce seront s’ils ont bien œuvré leurs petits ou arrière-petits-enfants. L’esprit bâtisseurs de cathédrales, poser les premières pierres, élaborer les premières colonnes, pour que les suivants ajoutent leur obole, fassent monter l’édifice, et ainsi de suite.

Tout cela, c’est plutôt le Bleu qui me l’a appris.

Le jaune et le vert donnent du maintenant à ces vues qui furent longtemps de l’esprit, jamais démenties, toujours bottées en touche, un peu comme ce qu’expriment ces femmes et ces hommes non des ronds-points, car l’on tourne en boucle, mais des carrefours, là où l’on s’engage.

Ces femmes et ces hommes sont du quotidien. Ils se sont levés. Ils ont pris pleine tronche les ripostes. Ils sont restés debout. Parce que ces chez gens-là, on reste debout, quarante ans que ça dure, pensez donc…

En cette passerelle entre deux années, c’est leur côté révélateurs qu’il me plaît de souligner.

En quelques semaines, pas plus, pas moins, ils ont tout montré. Leurs visages sont apparus. Leurs parlés pas pareils avec. Leurs propos se sont incrustés. Et on a vu. Vu une France coupée en deux. Vu une Europe qui ne tient pas la route à force de trop tenir son chemin de la calculette. Vu des médias malmenants être malmenés. Vu des journalistes se trouver en pleine torpeur. Vu dans cette proximité soudaine les insoutenables distances qu’une république cinquième du nom, bâtie sur les valeurs d’un après-guerre solidaire, aurait dû préserver si les fourches caudines des petits hommes d’états et des technocrates ne l’avaient pas siphonnée comme on se repaît d’un plat dont on n’aura pas à payer le prix et dont même on n’aura pas à assumer les affres de la digestions. On a vu où étaient les responsables et où étaient les irresponsables. On a vu Paris et revu sa province. On a vu l’échec retentissant de ce qui aurait du être notre avenir et qui est déjà notre passé sans avoir pu se diluer dans l’eau de nos jours en effervescence.

Quoi qu’on dise, quel camp que l’on se choisisse, l’année 2018 a pris un coup de jaune dans le cornet et si l’on tente de ne nous en montrer que les inconvénients (violences, commerces qui souffrent, PIB qui baisse, croissance en berne), avec une promptitude à désigner soudain les coupables pendant que les 40 précédentes années on fermait sa gueule dans les alcôves où les mocassins glissent sur les moquettes épaisses le sourire condescendant dans l’attaché-case, je met du Bleu dans mes yeux pour en voir aussi les avantages. Voilà des gens qui reviennent en force dans le discours national. Et évidemment, ça ne plaît pas à tout le monde. Mais le propre d’une manifestation n’a jamais été, sauf erreur de ma part, de faire plaisir à tout le monde.

Et donc et j’en terminerai là on en revient au vert, celui de l’espérance on l’a compris, mais surtout celui du cap que nous tend les bras la planète que l’on a colonisée sans vergogne ayant inventer le fric en passant. La transition est là. Ecologique, énergétique, renouvelable. Vert d’avenir à moitié vide pour l’instant que nous serions bien inspirés, dès 2019, et plus fort encore les prochaines années, de remplir. Pour une raison simple. Les opportunités d’emploi, de pouvoir d’achat, de citoyenneté, d’humanité sont là et nulle part ailleurs.

Je pense précarité énergétique et je vois des milliers d’emplois dans le BTP.

Je pense mobilités et je vois des milliers de solutions adaptées aux territoires où l’on vit.

Je pense société et je vois des milliers d’emplois nouveaux.

Dans ma grande palette de couleur, je laisse même les profiteurs profiter, il y a de la place pour tout le monde.

La transition est là et il est bon de se souvenir qu’une transition est un passage. Un passage d’un état à autre. D’un âge à un autre. Qu’une transition est une mutation consécutive a un changement. Le fait de passer graduellement d’un état à autre.

Tout est bien sûr dans le graduellement.

Posons une première pierre en 2019. Ce sera déjà très bien. C’est ce que je nous souhaite collectivement et vous souhaite collectivement.

Après les guerres, visibles, il reste des ruines. 

Nos ruines sont invisibles. Mais sur des carrefours de France, des gens se mobilisent pour nous rappeler qu’elles sont visibles pour peu qu’on sache les voir.

Alors voyons. Voyons de quoi nous sommes capables.

Et beaucoup est dans ce nous. Un nous dont je mesure la fragilité autant que je mesure comme il a été fragilisé toutes ces dernières années.

Un nous monde et pas seulement un nous France.

Mais commençons déjà par le nous France. Nous pouvons agir. Et faire des choix. Ne pas voir uniquement à quoi nous renonçons et aussi ce vers quoi nous tendons.

Les révélateurs sont là.

Le jaune dans le coeur

Evidemment, la violence visible est plus facile à capter. On peut la filmer, la prendre en photo, voir des visages qui éructent, etc.
Mais qu’en est-il de la violence invisible ? On fait en ce moment le procès des casseurs, dérive malheureuse et à combattre des citoyens qui par ailleurs se soulèvent eux qui ne votent plus et qui ne croient plus en la rue, alors ils occupent les ronds-points, comme un symbole d’une société qui française qui tourne en rond, et qui à force, ne tourne plus rond. Procès donc. Faut voir comme on nous parle, chantait en précurseur Alain Souchon.
Et si on parlait des autres casseurs aussi ? De leur victimes, plutôt. Invisibles bien sûr.
Combien de « victimes », au-delà des gilets jaunes, dézinguées par leurs entreprises, leurs collectivités, leurs « chef-fe-s », leurs collègues, leurs familles ?

La violence de la société saccage combien de soldats inconnus sans que la mine grave, un président, ses CRS et les médias ne viennent prendre justement des mines graves pour bien nous montrer que c’est pas bien ?
Combien de gens ont sauté par des fenêtres sur leur lieu de travail, ont laissé le pot d’échappement dans leur garage, choisi la corde pour en finir ?
Combien de personnes tournent à coups de cachetons pour « tenir » avec l’absurde « trou de la sécu » pour en rajouter des couches si besoin ?
Combien d’agents hospitaliers, de travailleurs sociaux, de juges, de flics, de médecins, d’infirmières, d’aides à domicile, d’élus, de bénévoles, bref, combien de millions e gens qui se dévouent en France ont un gilet jaune dans le coeur ? Eux qui ont un mal fou à trouver du sens à leurs vies qui pourtant n’en manquent pas ? Combien de jeunes n’y arrivent pas ? Combien de plus de 60 ans n’y arrivent plus ?
Dignité vous dites ? Raisonnable vous dites ?
Indécence je trouve.
Le « peuple » mérite respect. Mais il ne vote plus… Alors il arpente les réseaux sociaux, s’occupe des ronds-points, bien plus patient qu’on ne veut nous le faire croire.
Les rois de la parole publique n’ont pas compris, je crois, que ces gens-là, nous autres, on n’en est plus à tendre les mains comme si elles ne servaient plus qu’à recueillir des aides ou des cadeaux fiscaux, ni à poser des questions, ni à attendre des réponses.
Depuis plus de 40 ans, la douce France s’est endormie et aujourd’hui, cette France se réveille. Et pour entonner le refrain de Véronique Sanson, 40 ans, c’est long c’est court. C’est pas mai 68 qui se profile en 2019 puisque ça ne rime pas. 1789 ça rime. Et si je ne souhaite pas que ça dégouline, le père que je suis et le fils que j’étais en a le sourire des espoirs.
Ces derniers temps, j’avais découvert une forme de honte d’être Français.
Une certaine fierté fait son retour sous mes paupières.
Sans préjuger de rien.
Je vois plein de dignités toutes ces dernières semaines.
Et ça fait du bien même si j’entends aussi, autour de moi, la peur qui s’invite.