Mobylette etc.

Des fois, je suis couillon, hein : des fois, je me refuse à terminer un livre ! Il me reste quelques pages. Là, par exemple pour être précis : 82 J’adore ce combo peur / désir ! J’ai peur de lire les dernières phrases ; j’ai peur de devoir fermer le bouquin. J’ai peur que la main de l’auteur me quitte alors. Que la belle histoire que lui et moi nous nous sommes racontés quitte le réel, que le bel échange que lui et moi avons eu par-delà les lignes se termine. Et j’adore en même temps cette hâte le soir après la journée de labeur, ou le week-end dans la journée, de le retrouver ce bouquin. Ce pote.
Cela vous fait parfois le coup aussi ?
Certains auteurs au sens littéral du terme vous rentrent dedans.
Et c’est bonheur.
La connaissez-vous vous aussi cette (belle et étrange) sensation ?
Un titre sur un livre, un nom d’auteur (d’hauteur en l’occurrence) et pof, achat spontané et en réalité c’est un ami ou une amie qui vous vous offrez.
Djian et Van Cauwelaert, a une certaine époque.
Fred Vargas, Véronique Olmi, Alice Ferney.
Belleto. Olivier Adam. Nicolas Mathieu.
J’ai bonheur à vous parler du petit dernier (très drôle) : Frédéric Ploussard.
Drôle car comme son bouquin, le gars est grand. Très grand. Il en parle de ses cannes à rallonge dans son roman « Mobylette ».
A vrai dire, maintenant que j’en suis à la page 326, nous avions beaucoup de raisons de nous rencontrer.
De un, la mobylette. Sans même lire la dernière de couverture, cela m’avait plu l’idée qu’un type raconte une histoire de mobylette. Question de génération. Ma mobylette à moi, ce fut quelque chose ! Curiosité amusée, donc.
De deux, l’histoire a lieu en Lorraine. Dans ce que l’on appelle ici en Meurthe-et-Moselle le Pays Haut. Région minière. Métalleuse. Pas que : dans le Piémont Vosgien aussi, comme on dit également, un endroit merveilleux aux airs de Canada où le héros du livre aime à aller se baquer. Le grand est en effet un nageur. Parfois un plongeur. En eaux vives. Ca le détend. Ca le nettoie.
De trois, enfin : le gaillard est dans le bouquin un enfant de Lorraine qui a un job d’éducateur dans un foyer de l’enfance. Il narre des jeunesses à travers sa mobylette, la sienne d’abord, celle d’autres ensuite, et si ça poisse, si ça rayonne aussi. Il faut dire que si tout est toujours très sérieux évidemment, tout est toujours aussi teinté d’ironie et d’humour. Une écriture chaude comme la confiture sur la tartine.
Bref : chaudement, je vous recommande d’embarquer sur la « Mobylette » de Frédéric Ploussard.
Un grand livre, qui n’a pas de prix.
Un style d’écriture assez unique.
C’est en riant de préférence aux pleurs que l’on a le plus de chances d’affronter la vie.
Et c’est en faisant rire qu’on se partage la lourde tâche de suffoquer.
Plomb des vies du fer, des quartiers sidérurgiques, des quartiers ou des villages.
Poids de ce plomb qui peut tomber sur la gueule de n’importe qui à partir du moment où il naît quelque part.
Ce grand livre narre en mode choral cette enfance, puis cette vie « adulte » dans les mares hypocrites qui jonchent nos chemins et jalonnent nos emplois du temps.
Le lisant, le Fred, je me disais, putain, les mêmes maux, les mêmes mots et cette solidité au fond qui fait qu’on ne vacille pas malgré la boue du jour. Des jours. Sûrement parce que le soleil brille toujours quelque part si on a cette mobylette là qui cavale quelque part en nous.
Quoi d’autre sinon la liberté dans des coins de nos têtes ?

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