
Ce 17 juillet-là, maman, tu débarquais dans le monde au terme du voyage utérin et amniotique. A Bar-le-Duc. Tu prenais ton envol, à commencer par faire cesser la guerre alors que tu n’avais que deux ans, puis par essaimer la Lorraine au gré de tes évolutions professionnelles. La retraite venue, tu as parcouru le monde, 40 voyages m’as-tu rappelé un soir d’hôpital crépuscule.
Ce 17 juillet-là, maman, tu es revenue à la source de la rivière natale pour définitivement mettre les voiles vers l’Océan. A Bar-le-Duc. Une rose t’a accompagnée. Nous avons regardé le lit de la rivière, comme s’il filait vers là-bas, sous un chaud soleil d’été, sous une douce ombre végétale.
Il y avait un petit filet de vent fort sympathique.
Loin des dernières semaines, alors que ton estomac gargouillait de n’en pouvoir plus, alors que l’eau, déjà, te donnait à défaut du chemin la direction, il restera à jamais cet endroit et le doux clapotis de l’eau, les pierres rieuses, le fil du temps qui ne s’est jamais interrompu et qui se poursuit à travers les flots apaisés et sereins de l’Ornain.
Nous ne croyons pas au dernier voyage. Cela ne veut rien dire.
Nous croyons au voyage qui se poursuit, débarrassé de ses oripeaux, nettoyé de ce qui était sali, éclairé par ce qui restera.
Nous étions-là, tous les trois, au bord de l’eau, dans un silence disant l’amour, le respect, la force, l’énergie, la transmission. Réunis, cela t’aurait plu. Nos yeux ont laissé l’air ambiant faire flotter le parfum de l’accompli.
Et ce mot décidément têtu qui revient comme une évidence : merci. Merci à toi. Bon vent. Dors bien dans le lit nouveau. Il mène à l’océan.
PS : je n’ai pas eu le temps de te le dire, mais dans notre jardin, quelques jours après ton départ, des coquelicots se sont installés. Ils sont là. En plein milieu ou presque.
Merci pour ce partage dans lequel je me reconnais.
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