HF Thiéfaine, un 10 novembre à Dijon. Au zénith.

A bien y réfléchir, ce n’était pas de la nostalgie. Non. C’eût pu.
HF Thiéfaine, 2018, 40 ans de chansons, un concert largement puisé dans le vieux répertoire (mais l’on sait que toute oeuvre est éternelle donc hors du temps)…
Oui, c’eût pu.
Mais ce ne fut. Pour certains d’ailleurs ce fût.

Zénith de Dijon, samedi 10 novembre. 8 000 personnes. De tout.
Des jeunes et même des très jeunes juchés sur d’amicales épaules.
Des plus anciens.
Des assis et des debouts. Des culs serrés et des mâchoires épanouies.
Des bien habillés et des moins léchés. Quelques grincheux claustrophobes. Il en faut aussi.
Des cris qui jaillissent, des yeux qui se ferment pour onduler dans la nuit des foules, des lèvres qui semblent prier, des regards brillants quand une chanson resurgit, c’est la préférée de celui-ci, la découverte de celle-ci. Des mains qui saluent et des index qui se brandissent. Comme un ralliement une veille de 11 novembre. Comme une armistice entre les ondées crasses de nos actualités bien décaties.
Il y a les qui connaissent tout par coeur et parfois faut quand même s’accrocher (Les amants de l’agence de Madame Müller, Coupable, La vierge au Dodge 51 par exemple).
Côté son, ça envoie ! Un son imparable, de ces sons où l’on se dit, tout le bonhomme est là. Avec ses fils pas loin et ses amis autour. Il nous enveloppe, avec la toute la gamme du sourd à l’aérien, du bruit voire de la fureur et de la tendresse, la distance des élégants.
Le duo basse-basserie martèle, imperturbable. La douceur violoncelle. Le saxo basse. Les claviers soulignent, soupirent ou dézinguent. Les guitares sont devant, mais derrièe aussi, partout en fait. Saturées quand elles ne deviennent pas histériques. Parfumées de bois quand elles sont plus accoustques.
Et puis cette voix. Et puis ces mots. Qu’on dirait inventés pour cette voix, créée pour ces mots. 10 musiciens, ça pose le truc quand même. Elle navigue comme dans son jardin cette voix qui se connaît si bien, désormais.
La nostalgie est un caramel mou. La joie une autre affaire. On ne s’y pète pas les dents. On les avance pour croquer dans l’instant.
Et il y avait de cela dans les 40 balais de l’artiste jurassien, désormais jurassic, puisque un à un ses aînés s’en vont. C’est le temps des vétérans tonitruants, étonamment requinqués après les affres des tourments, ou justement requinqués par ces affres et tout cet amour deferle sans pathos parce que l’authentique se fiche royalement de la bienséance et des apparats.
Thiéfaine à Dijon, comme ailleurs, tient la route et la barraque, s’offre meme quelques pauses sur un canapé cosy posé-là comme pour dire, je suis vieux, je me repose un peu les gars, m’en voulez pas et on ne lui en veut pas, comme pour dire surtout, je savoure, les mecs, je prends le moment, je me confortable, face à vous les amis, vous qui me suivez depuis depuis de si longues années, comme si l’on ne savait plus au fond qui précède qui. En même temps, Les dingues et les paumés, Alligators 427 et quelques autres, voilà des chansons qui ne datent pas d’hier et qui restent furieusement d’aujourd’hui. De plus en plus.
Mon étonnement aura été d’entendre en fin de concert alors qu’on s’aimait dans les maïs les mains dans les pommes, de nombreux et très beaux « merci ».
C’est la classe, quand même.
40 ans de servitude textuelle et musicales, peu de pauses et beaucoup de proses, et même des septembre rose pour dans la fournaise des salles grand format croiser des milliers de gens qui lancent des mercis avant, chacun, chacune, de s’en retourner sur terre.
Des mercis qui ne doivent rien à personne. Simples. Sincères. Du coeur direct venus.
Pendant 2 h 30 on a tous partagé notre âme de clown, on a rien volé parce que voler c’est pas bien, on a tout donné et lui aussi et on a pas repris parce que reprendre cest voler. On sait bien que les rires naissent aussi des tristesses. Sans éloge. Et sans nostalgie. On verra ça plus tard.

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